Le CHU de Dijon monte en compétence pour la prévention des violences sexuelles
Le centre hospitalier universitaire de Dijon est lauréat de l’appel à projets lancé par le ministère de la Santé et de la Prévention « Programme de recherche sur la performance du système des soins ». Le projet présenté par le professeur Marc Bardou et son équipe consiste à évaluer l’efficacité médicale de la prise en charge des femmes victimes de violences par les structures « Maisons des femmes ».
17 septembre 2023 à 16h00 par la rédaction
Les Maisons des femmes sont des lieux d’accueil regroupant sur un site unique l’ensemble des interlocuteurs auxquels les femmes victimes de violences sexistes et sexuelles sont susceptibles de faire appel : professionnels de santé, assistantes sociales, officiers de police judiciaire... La première Maison des femmes a été créée en 2016 à Saint-Denis (Seine-Saint-Denis), à l’initiative de la docteure Ghada Hatem. Rattachée à l’hôpital Delafontaine, elle reçoit 60 à 90 femmes par jour, originaires de Seine-Saint-Denis mais aussi du Val-d’Oise et des Hauts-de-Seine, et réalise
17 000 consultations par an. Actuellement, il existe 13 Maisons des femmes en France qui reprennent ce concept. Le 9 mars 2023, la Première ministre, Élisabeth Borne, a fixé pour objectif la création d’une structure de ce type dans chaque département français.
L’étude promue par le CHU Dijon-Bourgogne et qui sera menée à partir de début 2024 consistera à comparer les effets de la prise en charge coordonnée dans une Maison des femmes d’une part, dans un centre médical ou une association d’autre part, au regard d’un critère principal : la proportion de femmes en situation de stress post-traumatique. Elle sera conduite en milieu urbain dans quatre départements (Bouches-du-Rhône, Isère, Paris et Seine-Saint-Denis) et inclura 360 femmes, dont 180 sont accueillies dans une Maison des femmes et 180 dans un centre de santé. Ces patientes seront soumises à un questionnaire permettant d’évaluer leur état de santé mais également de mesurer d’autres éléments à caractère sanitaire – prise de médicaments, d’alcool ou de toxiques, passage aux urgences... – ou extra-sanitaire – accompagnement social, appui à la recherche d’un hébergement, dépôt de plainte... « L’étude, sur une durée de trois ans environ, a pour objectif d’évaluer le service médical et social rendu par les Maisons des femmes, résume le professeur Marc Bardou, coordinateur scientifique de l’étude IROND-L. Nous évaluerons la proportion de femmes en situation de stress post-traumatique au moment de l’accueil puis six mois après la première visite. »
Ce programme de recherche est mené après une première étude, promue également par le CHU Dijon-Bourgogne conduite entre 2020 et 2021 et dont les résultats feront prochainement l’objet d’une publication. Cette étude, incluant 67 femmes, avait révélé qu’environ 60 % des patientes accueillies à la Maison des femmes ou dans deux centres municipaux de santé de Saint-Denis étaient en situation de stress post-traumatique. Ce dernier est repéré par le biais d’un questionnaire soumis aux patientes, permettant d’évaluer la situation de celles-ci au regard de la liste de questions prévue dans le cadre du PCL-5**. L’enjeu du programme de recherche est de valider l’intérêt d’un lieu d’accueil unique pour les femmes victimes de violences. « Nous pensons que la qualité de la prise en charge et son caractère complet sont bénéfiques pour les patientes, explique le professeur Bardou. Le fait de trouver, sur place, l’ensemble des interlocuteurs nécessaires, permet d’éviter d’être baladée entre différents services et d’avoir à répéter son histoire à des personnes différentes. Les difficultés rencontrées par les femmes les dissuadent en effet de porter plainte, portent atteinte à leur confiance en soi, retardent la reconstruction de soi et donc la sortie du stress post-traumatique. » Des conclusions qui sont très attendues, à l’horizon 2026, dans la perspective d’un déploiement national des Maisons des femmes. Elles contribueront à positionner le CHU Dijon-Bourgogne comme un établissement hautement compétent en matière de conduite de programmes de recherche au plan national voire international.
Le projet IROND-L mobilisera quatre techniciens d’études cliniques (Tec), un pour chaque département, sous la direction scientifique conjointe du professeur Marc Bardou, médecin au sein du service d’hépato-gastroentérologie du CHU Dijon-Bourgogne et coordinateur du module pluri-thématique CIC-Inserm*** 1432, et de Fabienne El Khoury, chercheuse en épidémiologie sociale à l’Inserm à Paris. Il bénéficie de l’appui technique et administratif du centre d’investigation clinique (CIC) et de la direction de la recherche clinique et de l’innovation (DRCI) du CHU Dijon-Bourgogne****. La docteure Tiphaine de Foucher de Carreil, médecin à la Maison des femmes de Saint-Denis, sera l’investigatrice principale du projet.